L’entreprise face aux contradictions de la Cour de Cassation
Les juges ont toujours été réticents à faire peser sur le salarié, partie faible par principe du contrat de travail, le poids des amendes pour infraction au code de la route commise pendant leur travail.
Position de la Chambre sociale:
Ainsi, la Chambre sociale de la Cour de Cassation a notamment jugé, le 17 avril 2013 (n° 11-27550) que seule la faute lourde du salarié permettait à l’employeur d’engager la responsabilité de son salarié. Sans faute lourde, pas de possibilité de demander le remboursement des amendes.
Au regard de la définition de la faute lourde, impossible d’envisager cela.
L’impunité est donc garantie.
Certes, l’évolution de la législation avec la multiplication des contrôles automatiques imposent à l’employeur de désigner le conducteur, qui devra payer directement l’amende.
Cependant, demeure la question des PV traditionnels, notamment pour stationnement, qui sont déposés sur le pare-brise du véhicule.
Le conducteur n’est pas identifié et l’entreprise, propriétaire ou utilisatrice désignée du véhicule, reste redevable de l’amende.
Si le salarié reconnaît sa responsabilité et accepte de payer, aucune difficulté.
S’il refuse, en revanche, l’entreprise devra payer l’amende et il ne lui restera comme recours que de sanctionner par un avertissement le salarié indélicat en lui rappelant l’obligation de respecter le code de la route.
Position de la 2ème Chambre civile (sécurité sociale et URSSAF)
Cependant, la 2ème Chambre civile de la Cour de Cassation, en charge du contentieux de la Sécurité Sociale et par conséquent des cotisations, ne l’entend pas de la même façon.
Plusieurs décisions, dont l’une très récente (Cassation, 2ème Ch. Civ., 9 mars 2017, n° 15-27538 et Cassation, 2ème Ch. Civ., 14 février 2019, n° 17-28047) viennent rappeler que selon les dispositions de l’article L. 242-1 du code de la sécurité sociale, constituent, sans que cela soit limitatif, des rémunérations, tous les avantages en argent, en nature ainsi que les sommes perçues directement ou par l’entremise d’un tiers constituent un avantage au sens de ces dispositions. La prise en charge par l’employeur des amendes réprimant une contravention au code de la route commise par un salarié de l’entreprise est donc un avantage assimilable à une rémunération, et entre dans l’assiette des cotisations sociales.
Ainsi, pour toutes les infractions au code de la route pour lesquelles les amendes ne sont pas constatées automatiquement et qui sont adressées au titulaire de la carte grise, l’employeur n’a pas beaucoup de solutions pour imposer au salarié le paiement.
La Chambre sociale interdit les amendes pécuniaires et considère que l’obligation de rembourser les infractions en constitue une, et ajoute que la responsabilité du salarié ne peut être engagée qu’à partir du moment où il a commis une faute lourde, ce qui bien évidemment ne peut pas être le cas.
Ainsi, l’entreprise sera sanctionnée une deuxième fois puisque, outre le paiement de l’amende, elle court le risque de devoir payer les cotisations sociales sur l’amende.
Le seul impact, mais il convient alors de le rappeler au salarié, est que son assiette de cotisations sociales va être majorée du montant de l’amende, ce qui va augmenter son précompte salarial (et diminué le salaire net) et surtout sa base d’imposition. Un rapide calcul permet toutefois de constater que cela demeurera toujours inférieur au cout de l’amende.