Rupture conventionnelle : la Cour de cassation donne des précisions

La Cour de Cassation nous a habitués à être pointilleuse dans l’application du droit du travail, faisant parfois même montre de créativité sur les obligations des employeurs. Le licenciement a ainsi été parfaitement contrôlé et encadré par la cour de cassation qui veille très scrupuleusement au respect des règles de fond et de forme.

Avec les ruptures conventionnelles homologuées, nous, praticiens du droit, nous attendions à une interprétation jurisprudentielle restrictive. Les premiers arrêts de Cours d’Appel reprenaient d’ailleurs les principes appliqués au licenciement, dans le silence de la loi (par exemple : pouvait-on convenir d’une rupture pendant un congé maternité, pendant un arrêt pour accident du travail, … ?).

En fait la Cour de cassation s’est montrée rigoureuse, mais n’a pas créé d’obligation supplémentaire, désavouant ainsi plusieurs Cours d’Appel qui s’étaient montrées plus exigeantes que la loi ne le prévoyait.

Se basant sur le droit des contrats, la Cour de Cassation exige, par exemple, que le document de rupture soit établi en au moins 2 exemplaires (le contrat est établi en autant d’exemplaires qu’il y a de parties), alors que l’imprimé ne le précise pas.

La Cour insiste essentiellement sur le principe du consentement du salarié à la rupture. En revanche, le texte ne prévoyant pas de protection particulière comme cela est le cas pour le licenciement, elle a rejeté toute les requêtes qui se fondaient sur des situations qui interdisent le licenciement dans celles-ci.

Dans la pratique quotidienne, des habitudes se sont assez vite mises en place.

Parfois, pour des raisons de calcul et d’arrondi des temps de présence, ou pour un décalage de quelques jours de la date de signature, le montant de l’indemnité de rupture fixé par les parties est inférieur de quelques euros à celui établi par la DIRECCTE. Motif de rejet de la demande, mais corrigé par la remise d’un nouvel imprimé rectifié dès l’information donnée aux parties, avec simplement un nouveau délai d’examen par l’administration, qui répond parfois même par retour de courrier.

Solution pragmatique et satisfaisante qui permet de corriger une erreur « matérielle » minime.

Par un arrêt récent, la Cour de Cassation vient de mettre fin à cette pratique.

« Attendu, selon l’arrêt attaqué (Douai, 30 septembre 2016), qu’engagée le 6 octobre 2008 par la société Béryl en qualité de responsable de magasin-gérant salarié, Mme X… a vu son contrat de travail transféré à la société André en avril 2013 ; qu’après un entretien du 26 juillet 2013, la salariée et l’employeur ont convenu d’une rupture conventionnelle datée du 27 juin 2013 ; que, par lettre du 30 août 2013, l’autorité administrative a refusé d’homologuer cette convention au motif que l’indemnité spécifique de rupture conventionnelle était inférieure au minimum conventionnel ; qu’à la suite de ce refus, les parties ont signé un second formulaire de rupture conventionnelle indiquant une date d’entretien au 26 juillet 2013 et une date de rupture du contrat de travail au 9 octobre 2013 ; que la salariée a saisi le 6 décembre 2013 la juridiction prud’homale d’une contestation de la validité de la rupture ;

…….

Et attendu que la cour d’appel, qui a relevé que la première convention avait fait l’objet d’un refus d’homologation par l’autorité administrative, a exactement décidé que la salariée devait bénéficier d’un nouveau délai de rétractation et que, n’en ayant pas disposé, la seconde convention de rupture était nulle ; que le moyen n’est pas fondé ; »

Cass. Soc. 13 juin 2018 (n° 16-24.830)

Si l’accord sur la rupture est rejeté par l’administration, même pour une simple erreur de calcul de quelques euros, la procédure doit être reprise, y compris le délai de rétractation de 15 jours donné aux parties après sa signature et avant de l’envoyer à la DIRECCTE.

D’où l’intérêt de faire un arrondi supérieur de l’indemnité de rupture.